« La perte de temps est un concept étrange. Pour perdre du temps, il faudrait en avoir préalablement.« 

Extrait de l’atelier

GarganText au Turfu Festival !

Atelier d‘écriture participatif et immersif

Revivez l’évènement !

Qu’est-ce que le temps ?

Le 13 avril dernier, GarganText participait au Turfu – un festival de sciences participatives – à l’occasion d’un atelier d’écriture collective. Sous la houlette d’Alexandre Delanoë, co-créateur de la plateforme  et guidé par les membres du collectif Les Parallèles Flingueuses, GarganText a permis à la vingtaine de participants présents de mettre en récit leurs propres perceptions du temps vécu – subi, intime, solitaire.

A partir de ces récits, GarganText a généré une carte collective des représentations du temps, qui a servi de support sémantique à la création de courtes scènes d’improvisation en petits groupes.

 Cet atelier propose une approche pédagogique alternative pour aborder et comprendre l’usage de la plateforme. Il s’inscrit également dans le cadre d’une collaboration au long cours entre l’ISC-PIF et Les Parallèles Flingueuses, qui utilisent GarganText comme outil de travail pour l’élaboration d’une pièce de théâtre.

Quelques extraits de l’atelier

Fumer occupe beaucoup mon temps

Fumer occupe beaucoup mon temps, et en même temps, je sais faire plusieurs choses en même temps. Penser à mes désirs occupe beaucoup mon temps, mais je sais faire plusieurs choses en même temps. Est-ce que le temps s’additionne ? Comment on calcule le pourcentage de temps que les choses nous prennent dans la vie ?  Je veux dire sur vingt-quatre heures, je passe peut-être sept heures à dormir, par exemple, mais sur ces sept heures, je passe six heures cinquante-neuf à respirer, mon cœur bat pendant six heures cinquante-huit et je rêve pendant trois heures. Si j’additionne tout, ca fait beaucoup beaucoup trop. Donc comment je calcule tout ça ? Comment je mesure mon temps ?

Je suis toujours en retard

La dernière fois que j’étais en retard ? Ce matin même ! Je suis toujours en retard, je suis jamais à l’heure, je me réveille dans les bras du désir et j’oublie ce qu’il faut ou ce que je dois. J’y reste un temps, plus longtemps que prévu, et moins de temps que nécessaire. J’y reste et je me décale, je sors du planning, de l’agenda. J’oublie l’horloge, je me sens bien. Je suis toujours en retard, tous les matins, pour chaque chose. Je cours après ce que je dois faire, parce qu’il y a toujours contradiction entre ce que j’avais prévu de faire et ce que je veux faire à l’instant présent. Le plus souvent, il s’agit tout simplement de dormir un peu plus.

Le mec à l’air vachement plus vieux que moi

Ce matin, j’étais très en avance parce que je pensais faire une tâche administrative avant d’aller au théâtre ; mais l’embouteillage m’en a dissuadé. Alors, j’ai bifurqué en voyant l’Eglise cube de Mathilde et le soleil sur la petite terrasse. La petite terrasse du bar de la place Saint Gilles m’a invitée à me poser là. Je venais assez souvent dans ce bar, il y a longtemps, quand les gars étaient enfants. Ils crapahutaient sur les ruines. Pourquoi elle est en ruine, l’église ? Un jour, on y avait découvert un mini trésor, dans une niche de pierre de l’une des arches. Et c’était quoi, ce trésor ? Je ne m’en souviens pas, mais je me souviens de l’empressement des gars, de leur excitation et de l’inflexion de leur voix. Un des hommes du café évoque le souvenir d’un bar de nuit qui existait dans le quartier. C’était un pub, avant, quand il était étudiant. Un autre se moque de lui : c’était dans les années 60, au moins ! Le gars dit : ça date des années 90. Quoi ? T’étais encore étudiant dans les années 90 ? Le mec a l’air vachement plus vieux que moi, merde.

La perte de temps est un concept étrange.

La perte de temps est un concept étrange. Pour perdre du temps, il faudrait en avoir préalablement. Or le temps n’existe que dans la mesure où je le vis. Dès que je passe du temps, je ne le perds ni ne le gagne. La question est plutôt donc celle du degré de richesse du temps. Le temps que je passe – car le temps ne passe pas, c’est toujours moi qui passe du temps, le temps ne passe qu’à la première personne. Le temps que j’ai passé valait-il la peine ? A-t-il enrichi ma vie ? A-t-il enrichi mes proches ? A-t-il enrichi le monde ? C’est une question légitime. Mais dans tous les cas, je n’ai ni perdu ni gagné de temps.

Je préfère la nuit

Que faire ? Qu’est-ce que je fais la nuit où, là, tout le monde dort. Monde des interdits, versant carnavalesque enfin permis, acceptable, tolérable, car nulle part ailleurs du jour. Hors du temps, hors rythme. La boisson, la bêtise, la décadence, les autocollants antifascistes sur les panneaux, escalader des poteaux, le sexe dans la rue, l’amour derrière l’église. Je ris, mais si fort. J’aime, bien plus encore et mieux qu’à midi. Les paillettes aux yeux, c’est merveilleux. Donc oui, j’aime la question 8, aussi car oui, je préfère la nuit. L’antithèse du correct, du travail, de l’ordinaire. Enfin, la nuit, on peut faire, personne ne nous reprochera de ne pas travailler, de nous amuser, de ne pas regarder l’heure.

Alexandre Delanoë

Hélène Seretti

Pauline Landel

Flora Donars