MUNICIPALES

Ne vous abstenez pas de savoir!

Dans le contexte du deuxième tour des élections municipales de 2014, ce projet propose un site interactif permettant de mieux interpréter les résultats de l’abstention ville par ville. A travers une présentation vulgarisée des travaux de chercheurs du Laboratoire de Physique Théorique et Modélisation qui ont découvert une loi mathématique sous-jacente à un grand nombre de résultats d’élections locales dans plusieurs pays, il est proposé une mesure de civisme des villes. Le site propose par ailleurs de participer à une expérience d’intelligence collective à grande échelle : l’agrégation des anticipations de chacun peut-elle permettre de prévoir les résultats mieux que les sondages ?

Équipe

David Chavalarias (CAMS/ISC-PIF – EHESS/CNRS) Jean-Baptiste Leenart (ISC-PIF) Laura Hernandez (LPTM,CNRS/Univ. Cergy-Pontoise)

Visitez le site interactif

Découvrez, ville par ville, le score normalisé de participation aux dernières élections municipales.

municipales 2014 1er-tour

Dans un article des chercheurs du LPTM, CNRS-Université de Cergy Pontoise, ont montré que la variation de la participation aux élections municipales avec la taille de la commune (c’est à dire, son nombre d’habitants) suit une loi mathématique qui est la même dans des pays très différents, indépendamment des règles du scrutin. Plus une ville est importante, plus le taux d’abstention est, en moyenne, élevé. Ce résultat est important pour commenter le taux d’abstention ville par ville, puisqu’il faut prendre en compte cette loi pour les rendre comparables. En analysant avec la même méthodologie, la participation au 1er tour des municipales 2014, ils observent aujourd’hui que cette régularité a été brisée. Ces nouveaux résultats peuvent être analysés dans l’outil de visualisation développé par l’Institut des Systèmes Complexes de Paris Ile-de-France. Cette rupture de régularité est illustrée sur la figure ci-contre, où l’on représente le taux logarithmique moyen de participation en fonction de la taille de la commune pour le premier tour des élections municipales de 2014, comparé à celui des élections de 2008 et de 2001. Les régularités précédemment observées se maintiennent pour les communes de moins de 1000 habitants environ (la droite de 2014 est parallèle aux droites des élections précédentes mais décalée vers le bas, traduisant une diminution globale de la participation). En revanche, pour les communes de plus de 1000 habitants, cette diminution de la participation avec la taille de la commune est nettement moins prononcée. Il faut noter que cette année les communes de plus de 1000 habitants sont passées à la règle électorale générale. Cependant les régularités observées précédemment ne dépendaient pas de la règle électorale (en particulier pour la France, on n’observait pas de rupture de pente au niveau de 3500 habitants). Cette observation quantitative pose plusieurs questions. Par exemple, bien que l’abstention globale ait atteint un record, produisant un décalage vers le bas de toute la courbe 2014 par rapport à celles des élections précédentes, la rupture de pente montre qu’il y a moins d’abstention pour les communes de plus de 1000 habitants que celle qui aurait été espérée si les régularités précédemment observées n’avaient pas été brisées. A ce stade il est difficile d’expliquer les raisons de ce comportement. On pourrait envisager l’existence d’un « seuil d’abstention maximal», qui briserait les régularités observées auparavant en renforçant la participation attendue pour les grandes communes. Cependant dans l’article cité les régularités observées concernent des pays où le taux de participation global se situe entre 88% et 18% environ. Le concours de disciplines spécialisées (sociologie, histoire, sciences politiques) est essentiel pour continuer au delà de la simple spéculation

Argumentaire

municipales20081ertour Il a été récemment montré [1] que la dépendance du taux moyen de participation aux élections municipales avec la taille du corps électorale des communes peut être précisément décrite par une loi mathématique empirique (Fig.1). Dû au caractère très général de ce résultat, (il est valable pour des élections municipales dans divers pays, il ne dépend ni des détails de l’élection -la règle électorale-, ni du caractère urbain ou rural des communes) on dit qu’on a observé une régularité dans le comportement de la participation électorale. Plus précisément cette régularité concerne la pente des droites de la figure 1, tandis que la valeur du taux de participation logarithmique moyen, pour une taille donnée, ne présente pas de régularité : elle est caractéristique de l’élection et dépend du taux de participation global, au niveau du pays. Il est intéressant de remarquer qu’une telle régularité n’est pas observée lorsqu’on étudie le taux de participation des mêmes communes aux élections non locales, comme les élections régionales, nationales – législatives, présidentielles… – et européennes (voir figure 2 dans les annexes). Le fait de trouver la même loi mathématique pour des pays très différents permet de supposer que la cause d’un tel comportement ne peut pas dépendre des détails caractérisant le pays en question. En revanche, le caractère local de l’élection semble jouer un rôle essentiel et l’on y peut voir une indication de la cohésion du groupe [1].